Remo Vescia, Commissaire de l’Exposition « Ensemble, construisons la Terre », nous a quittés le 28 février 2025
« Je suis né un dimanche des Rameaux, le 24 mars 1929, à Alexandrie en Égypte. Le sang qui coule dans mes veines prend sa source dans le plus grand fleuve du monde, le Nil, là où il se déverse en delta, après un long voyage à travers l’Afrique. Alexandrie paraissait alors, à mes yeux d’enfant curieux, un beau jardin fleuri qu’ourlait la mer bleue, où nous pouvions jouer, nous baigner, nous amuser tous les jours quand le temps très doux le permettait. Une population cosmopolite – un habitant sur cinq n’était pas un arabe Égyptien,- l’habitait avec bonheur en grande insouciance ».

Remo Vescia, Commissaire de l’Exposition « Ensemble, construisons la Terre », nous a quittés le 28 février 2025.
Né en 1929 à Alexandrie d’Egypte d’une famille italienne, scolarisé chez les Jésuites au Caire il arrive en France en 1949. Il étudie à Paris à la Sorbonne. Docteur es-lettres, ancien élève de l’Institut des Sciences Politiques et de l’Institut d’Administration des Entreprises, Remo VESCIA a été, après une brillante carrière commerciale, nationale et internationale, Directeur à la Direction de la Communication pour IBM France, avant d’être Chargé de mission au Ministère de la culture, puis à la Direction des Affaires culturelles de la Ville de Paris. Il a enseigné le Mécénat d’entreprise à l’IPAG et à l’EAC et a contribué au développement du mécénat en France : « Il sait parler aux chefs d’entreprise le langage de l’art et aux artistes le langage de l’entreprise ».
En 1998, il rejoint l’Association des amis de Pierre Teilhard de Chardin et co-organise des voyages d’étude teilhardiens dans plusieurs pays (Égypte, Chine, USA) et en 2010, Assise. C’est alors qu’il crée l’exposition « Ensemble construisons la Terre » qui voyagera sur 20 sites en France et à l’étranger. En 2011, naîtra le site-web Teilhard International.
Remo Vescia a publié de nombreux articles dans les revues Études, Teilhard aujourd’hui, Noosphère.
à François Cheng, son ami
Dites et redites à tous mes amis de la Terre combien Teilhard m’a aidé à comprendre et à aimer le monde, la matière organique qui le compose – Sainte Matière ! – et aussi dans les forces vives de l’Esprit qui s’en dégagent et le subliment pour l’humaniser et le diviniser, – la Noosphère! avec l’Éternel Féminin !
Dites à qui veut bien m’entendre que le milieu qui nous porte et nous entoure est toujours appelé à s’élever comme un bel arbre vers l’azur pour rendre gloire au Maître de la Lumière et de la Vie ! Au Maître de la Parole.
Dites au Monde et à la Vie que je les ai aimés de tout mon cœur, comme une simple note dans l’immense concert des êtres et des choses, bien peu de chose.
Je dis au Christ, mon Dieu d’Amour que je n’ai jamais su aimer comme un Monde et à sa Mère, la Vierge Marie que je vénère, tout mon Amour défaillant, Lui qui est L’Amour Total, le chemin de l’Amour, la Vie !
Merci Mon Dieu pour cette prodigieuse Vie offerte si généreusement, depuis près d’un siècle, en des temps difficiles, – très difficiles pour certains, de plus en plus nombreux, hélas !
Lors de ses obsèques au Père Lachaise le 11 mars 2025, Remo Vescia a reçu de nombreux témoignages de ses proches :
Tu nous as appris à connaitre les étoiles, les poètes, les philosophes, les grands penseurs religieux, à travailler, réfléchir, dessiner, penser, croire en l’homme et croire en Dieu.
Diane Meyer
Il y a un an, tu avais écrit : « J’espère que l’on gardera de moi le souvenir d’un homme heureux de vivre qui a eu la chance de mener une vie pleine d’amour des siens, de l’Univers et de l’humanité tout entière. » François Vescia
Une composante majeure fut son combat pour la diffusion de la pensée du père Teilhard de Chardin, jésuite et paléontologue décédé en 1955. Tu avais fait tienne, Remo, sa vision d’un monde en évolution animé « du dedans » par un Christ qu’il nous faut percevoir «toujours plus grand.» Il était naturel que ce soit toi qui organise, en collaboration avec l’Association des Amis de Pierre Teilhard de Chardin, le colloque du Caire. C’est ainsi que, en 2002, que nous nous sommes rencontrés. J’ai découvert alors ton engagement ainsi que la vie de l’Association des Amis de Pierre Teilhard de Chardin.
Ce fut aussi un compagnonnage avec toi au sein du Conseil d’Administration de l’Association des amis de Pierre Teilhard de Chardin à partir de 1998.
Il y eut aussi l’animation du Centre Européen Teilhard, par essence n’étais-tu pas international ?
Le cœur de ton implication fut la réalisation de ta formidable exposition sur saint François d’Assise, François Cheng et Pierre Teilhard de Chardin. Cette exposition, reprenant une phrase du père Teilhard de Chardin, fut intitulée : « Construire la Terre ». Animé par le souffle de ces trois hommes unis par un lien spirituel, poétique et mystique, tu n’eus de cesse que de faire connaître et de diffuser cette exposition que tu avais totalement prise en charge.
Jamais ta motivation teilhardienne ne fléchit, tu étais toujours prêt à organiser une manifestation, à lire des textes du Jésuite de ta belle voix profonde–ainsi que nous venons de l’entendre-, à animer telle ou telle rencontre.
Alors qu’il lui était annoncé des deuils, le père Teilhard de Chardin disait fréquemment « Maintenant il sait et il voit. Oui, désormais Remo sait et voit.
En achevant ce petit témoignage, permettez-moi de terminer sur une phrase de Pierre Teilhard qui ne peut que résonner avec l’engagement de Remo :
« Celui qui aura aimé passionnément Jésus caché dans les forces de la Terre, la Terre en défaillant la serrera dans ses bras géants, et avec elle, il se réveillera dans le sein de Dieu. »
Marie Bayon de La Tour (Petite-nièce de Pierre Teilhard de Chardin)
Le poète regarde le monde et nous invite à voir avec lui. Mais le poète cache son jeu. « Poète, philosophe, mystique : on ne peut guère être l’un sans l’autre », notait Teilhard de Chardin.
Remo était poète, assurément, par sa manière de voir le monde
Remo était philosophe, apparenté à cette science qu’on représente volontiers par une chouette – l’oiseau de nuit qui s’efforce de voir dans les ténèbres
Remo était mystique, celui qui voit vibrer l’univers cosmiquement lorsqu’on touche la corde du Christ
Le monde que Remo nous invitait à voir était rempli de lumière. En alchimiste qui aurait réussi, Remo parvenait à transformer la boue de la souffrance en or de l’esprit.
Remo était jeune d’esprit : il en avait les qualités et aussi l’impatience. Rien n’allait jamais assez vite avec lui ! Car s’il nous invitait à « voir », il poussait tout aussi vigoureusement à « faire », renouant ainsi avec l’origine grecque du verbe ποιεῖν, créer – mot qui a dérivé ensuite en poésie. À nous de savoir saisir cet élan, ne pas laisser s’éteindre la flamme du poète.
Mercè Prats (Historienne et auteur de la biographie de Teilhard)
Trois grands traits de sa personnalité plus intime, qui pourraient expliquer son attachement à Teilhard : son regard porté vers l’avenir, son élan quasi mystique pour l’amour et la beauté.
En ce qui concerne l’avenir, Remo a certainement dû être séduit par la proposition de Teilhard que l’évolution a un sens, que le monde progresse vers une convergence spirituelle où l’humanité tout entière sera unifiée. L’avenir a un sens, quelle merveille, qui peut en dire autant, surtout aujourd’hui.
Et d’après Teilhard, cette progression se fera, non seulement par la technologie et la culture, mais surtout par une force d’amour universelle, véritable énergie évolutive. Quelle source d’inspiration pour Remo, de quoi motiver sa pensée et ses actions au-delà et au travers de tous les tourments de sa vie.
Et la beauté, oui, il y a bien sûr les rencontres, les regards, le silence des êtres. Avec l’Eternel Féminin de Teilhard, quelle inspiration ! Inspiration partagée avec son ami Francois Cheng, immense poète de la spiritualité de l’amour et de la beauté, sans oublier Saint Francois, dont la prière si simple surpasse tous les programmes politiques actuels.
Tout en étant bien ancré dans le monde, accompagné de sa compagne de toujours, de sa famille et de ses amis, farouchement fidèle à ses passions, Remo a été un véritable apôtre de l’amour.
François et Hélène Brikkè
Vous étiez encore mortel il y a quelques jours et vous êtes à présent devenu immortel.
C’est donc comme l’immortel que vous êtes devenu, un membre de l’Académie Française à laquelle vous méritez bien d’appartenir, tel François Cheng qui nous a présentés l’un à l’autre, que nous vous accueillons dans notre mémoire personnelle et collective, dans notre Académie intérieure.
Votre vie, cher Remo, dans le meilleur signe et sur les plus belles traces de Dante, François d’Assise et d’un autre François – avec le premier, votre fils –, François Cheng, celui qui a voulu et scellé notre amitié, votre vie a été vécue avant tout sous le signe de l’Amour et votre merveilleuse famille, cher Patriarche.
L’Amor che move il sole e l’altre stelle… cet amour, bien loin de toute complaisance sentimentale ou faussement poétique, est quelque chose d’extrêmement concret, réel et vraiment beau. C’est notre pari — le Pari(s) de(s) Paris, oserai-je dire —, inépuisable, d’éternité. Et ici, vous le savez beaucoup mieux que moi, l’éternité n’est pas de trop.
Eh oui, avant la foi, qui est et sera à jamais en vous, il y a et il y aura toujours l’amour.
Cet élan à la fois personnel et cosmique que François Cheng, qui vous salue et bénit, appelle le souffle du vide médian.
Michele Baraldi (Poète et Ecrivain)
Lorsque Remo Vescia m’a demandé de réaliser une exposition autour des trois personnages éminents que sont Teilhard de Chardin, François d’Assise et François Cheng, avec pour thème « Ensemble, construisons la Terre », j’ai aussitôt pensé aux jeunes dont la quête de sens est aujourd’hui palpable. Je lui ai proposé la maquette d’un parcours ascendant qui va de la « Vie ouverte » à la « Vie plus haute », du rejet du néant à la connaissance et enfin à l’action collective, un chemin de résurrection vers l’Amour divin. Il l’a aussitôt adoptée avec enthousiasme et l’aventure de l’exposition a débuté et s’est produite dans plus de vingt lieux jusqu’à ce jour où il a eu la joie de la voir au Centre Teilhard de Chardin de Saclay et de la savoir à la Clarté-Dieu d’Orsay. Désormais, l’exposition « must go on », son Commissaire y veille dans « l’amour qui meut le soleil et les autres étoiles ».
Anne Melin
